FRANKENSTEIN (1931)

L'histoire

Dans un paisible village d'Europe, le docteur Frankenstein venant de terminer de brillantes études de médecine, se livre à de curieuses expériences au cœur de son chateau-laboratoire. Là, il tente de redonner vie à un être assemblé de divers morceaux de cadavres. Fritz, son serviteur lui procure par erreur le cerveau d'un criminel.

 

C'est un être nouveau qui va naître... par l'énergie provoquée par la foudre. Mais l'être créé par Frankenstein étrangle Fritz, tue le Dr Waldmann et une petite fille dans sa fuite.

 

Par manque d'amour et rejeté par l'ensemble de la population, il va semer la destruction dans tout le village avant d'entraîner son créateur dans un moulin qui sera brûlé par les villageois..

 


L'AVIS DE SF-STORY *****

Le réalisateur, James Whale, tourne deux pièces, Journey's End (1930) et Waterloo Bridge (1931), avant d'accepter l'adaptation, avec un budget assez faible, de la pièce de Peggy Webling, d'après Mary Shelley. Avant lui, seuls deux autres Frankenstein avaient été réalisés, tous deux muets : il lui est donc encore possible de recréer le personnage… Deux suites suivront : " La fiancée de Frankenstein " (1935), " Le fils de Frankenstein "(1939). James Whale signe avec ce film la première adaptation sonore de Frankenstein donnant naissance à " l'age d'or " du cinéma hollywoodien d'épouvante, le cinéma fantastique devenait ainsi un genre à part entière.

 

Techniquement, on peut être déçu par l'appareillage électrique grand-guignol du laboratoire, les décors outrageusement carton-pâte, l'absence quasi-totale de travellings… mais c'est oublier que nous ne sommes qu'en 1931 et que nul ne pensait, lors de l'établissement du budget, que le film aurait autant de succès. Et ce serait aussi négliger la beauté de l'image: étrangement, en noir et blanc, les ombres confèrent aux acteurs un caractère d'icônes et les rendent si marquants que jusqu'à aujourd'hui, toutes les représentations du Monstre se sont calquées sur Karloff - représentations d'ailleurs généralement presque monochromes, entre son teint verdâtre et son costume kaki.

 

Quant à l'histoire, elle suit le roman de Mary Shelley certes de loin - l'expérience prouve qu'il est difficile d'adapter un texte à la lettre - mais non sans bonheur: la scène finale de l'incendie du moulin nous rappelle symboliquement le sous-titre du livre: "…ou le Prométhée moderne". Shelley voulait attirer l'attention de ses lecteurs sur les pouvoirs de la technique moderne, et la possibilité que l'homme ne soit pas assez fort pour en porter les responsabilités. Est-ce un autre thème lorsque les villageois, assoiffés de sang, retournés à la barbarie, détruisent la créature en incendiant son refuge, le moulin: l'outil le plus élaboré qui soit à leur disposition?

 

Whale fait par ailleurs preuve d'humour comme dans la scène où le Monstre s'introduit auprès d'Elizabeth, après que Frankenstein l'a enfermé "par précaution" et de poésie. Dans une séquence censurée, le Monstre jette une fillette dans un lac; mais il ne le fait pas par sauvagerie, il le fait uniquement parce qu'il n'a plus de fleurs à lancer dans l'eau, et qu'il croit qu'elle va flotter aussi joliment que les pâquerettes… Il ne tue jamais par cruauté, mais seulement en réaction à celle des autres.

 

Avant le générique du film, l'acteur Edward Van Sloane avait prévenu le spectateur : " Frankenstein est l'histoire d'un homme de science qui tente de créer un être humain en rivalisant avec Dieu. ".

 

L'énorme succès commercial du film entraîna de nombreuses séquelles plus ou moins réussies, allant jusqu'à affronter des monstres célèbres de la même époque comme la Momie, Dracula, etc.. On peut citer les films suivants, hormis les suites de Whale avec Boris Karloff : " Frankenstein rencontre le loup-garou ", " La Maison de Frankenstein ", " Frankenstein s'est échappé ", " La revanche de Frankenstein ", " Frankenstein 1970 ", " L'empreinte de Frankenstein ", " Le retour de Frankenstein ", " Les horreurs de Frankenstein ", " Chair pour Frankenstein ", " Frankenstein Junior "...

 

 

HORS-CHAMP*

Le monstre de Frankenstein

 

Avec ce film, le public découvrit une des stars de cette période en la personne de Boris Karloff dont le nom n'était pourtant pas crédité au générique du film où il avait été remplacé par un point d'interrogation ! Il était en effet caché par un maquillage horrifique signé par Jack P.Pierce.

 

Le rôle aurait du être attribué à l'acteur Bela Lugosi (le comte Dracula dans Dracula sorti la même année) qui a rejeté l'offre. Une décision qu'il a profondément regretté, il aurait déclaré qu'il était une star dans son propre pays, et qu'il n'était pas venu en Amérique pour être un épouvantail! Une bobine de test de 20 minutes, mettant en vedette Bela Lugosi comme le monstre et réalisé par Robert Florey, a  même été filmée sur les décors de Dracula (1931). Cette vidéo n'a pas été vue depuis 1931 et est maintenant considérée comme perdue.

 

Le monstre dans ce film ne ressemble pas physiquement au personnage du roman de Mary Shelley. C'est le maquilleur Jack P. Pierce qui a proposé des innovations telles que la tête plate du Monstre, les boulons dans le cou, les paupières tombantes et le costume mal ajusté, assez proche des vêtements en haillons que portaient les vagabonds aux Etats-Unis dans les années 30. Tous les autres films qui lui ont succédé et qui présente l'une de ces anomalies physiques s'inspire du travail de maquillage de Pierce.

 

Le succès du film doit aussi à son interprétation. C'est assez paradoxal quand on sait que Boris Karloff a été considéré comme un acteur anonyme par Universal qu'il n'a pas été invité à la première du 6 décembre.

 

Preuve du succès et des copies qui lui ont succédé : le design de maquillage du monstre par Jack P. Pierce est maintenant sous copyright de Universal jusqu'en 2026, et sous licence par Universal Studios Licensing, Inc.

 

L'imagerie populaire du monstre de Frankenstein qui le voit avec un peau verte provient du film et de l'affiche originale. Jack P. Pierce a appliqué une peinture grasse vert-gris pour la peau du monstre qui est apparue comme un ton gris pâle mortifère sur la pellicule noir et blanc. Cela contrastait avec les valeurs de gris des personnages normaux du film. La seule exception était l'utilisation d'une couleur beaucoup plus sombre sur le bras exposé du monstre - présentant la chair noire et morte.

 

Frankenstein contre la censure

 

Dans une scène, le monstre traverse une forêt et tombe sur une petite fille, Maria, qui jette des marguerites dans un étang. Le monstre la rejoint  mais Maria manque bientôt de fleurs. En cherchant quelque chose à jeter dans l'eau, il regarde Maria et se dirige vers elle. Dans toutes les copies américaines du film, la scène se termine ici. Mais à l'origine, la scène filmée montre le monstre saisissant Maria, la jetant dans le lac, puis s'enfuit voyant que la petite Maria ne parvient pas à flotter comme le faisaient les fleurs.

 

Cette scène a été supprimé parce que les censeurs qui se sont opposés à la fin violente de la petite fille. Cette scène a été ensuite restaurée dans la réédition du DVD

 

Après avoir amené le monstre à la vie, Dr. Frankenstein prononce la phrase célèbre, "maintenant je sais ce que c'est d'être Dieu!" Le film a été initialement enregistré avec cette ligne de dialogue, mais quand il a été réédité à la fin des années 30, les censeurs ont exigé que la phrase soit retirée car, pour eux, c'était blasphématoire. Un fort coup de tonnerre lui a été substitué sur la bande sonore. Le dialogue a été partiellement restauré pour la sortie vidéo, mais comme aucun enregistrement décent du dialogue n'a pu être trouvé, il semblait encore brouillé et peu distinct. La partie de dialogue censurée a été partiellement réintégrée à la bande son dans une "version restaurée": un enregistrement aurait été trouvé sur un vieux disque Vitaphone . La technologie audio moderne a été utilisée pour réintroduire le dialogue dans le film sans que cette insertion soit détectable.

Anecdotes

 

Ken Strickfaden (non crédité au générique), qui a créé tous les effets électriques pour le film, a également doublé Boris Karloff pendant les séquences qui montraient les étincelles de millions de volts sur son corps. Les mêmes machines ont été utilisées plus tard dans la comédie Frankenstein junior (1974), et le réalisateur Mel Brooks a donné à Strickfaden le crédit à l'écran qu'il n'avait pas reçu dans ce film.

 

Le film fut N°1 au box-office en 1931.

 

 

REALISATEUR ET ACTEURS

James Whale

 

James Whale (1896-1957) débuta comme acteur de théâtre, puis se spécialisa dans les adaptations cinématographiques de pièce de théâtre. En contrat avec la compagnie Universal, il fut choisi à la place de Robert Florey, avec qui il avait d'ailleurs travaillé sur le scénario.

 

Le casting prévoyait Bela Lugosi, acteur déjà connu, mais celui-ci refusa un maquillage lourd à porter. James Whale imposa alors un inconnu : Boris Karloff dans le rôle de la créature. Ses choix furent encore plus tranchés dans la suite " La fiancée de Frankenstein " où il choisit des amis proches pour les rôles secondaires et conçut même le maquillage du monstre.

 

Il ne réalisa plus de films à partir de 1941 pour se consacrer entièrement à la peinture. Il fut retrouvé mort dans sa piscine, laissant planer un doute sur un éventuel suicide.

Boris Karloff (Le monstre)
Boris Karloff (Le monstre)

Boris Karloff

 

Boris Karloff (1887-1969) connaît la célébrité avec son rôle de la créature de Frankenstein. De son vrai nom, William Henry Pratt, il est spécialisé dans les rôles de méchants et a joué de petits rôles dans environ 70 films. Il donne une dimension poétique et humaniste à la créature qu'il rend victime et irresponsable de ses actes.

 

Quelques années plus tard; il déclarera : " Le Monstre de Frankenstein était une créature muette, rejetée, tragique, mais je lui dois tout. C'est mon meilleur ami ". Sa figure emblématique est liée à l'un des thèmes cher au cinéma fantastique : le savant fou dont les découvertes non maîtrisées dépassent le créateur comme dans " Le rayon invisible " (1936) de Lambert Hillyer par exemple. 

 

 

© 1931 Universal Studios. Renewed 1959 Universal Studios/All Rights Reserved


GENERIQUE

Frankenstein (Frankenstein), 1931, James Whale, Etats-Unis.

Noir et Blanc. Son Mono (Western Electric Sound System).

Format d'image : 1.20

Réalisateur : James Whale

Durée : 1h10

Productions :   Universal Pictures 

Producteur : Carl Laemmle Jr. Producteur associé : E.M. Asher.

Directeur de la photographie : Arthur Edeson, Paul Ivano.

Direction artistique : Charles D. Hall.

Décors : Herman Rosse. 

Montage : Clarence Kolster.

Maquillage : Jack P. Pierce.

Scénario : Richard Schayer, Garrett Fort, Francis Edward Faragoh, basé sur une composition de John L. Balderston, adapté de la pièce de Peggy Webling, d'après le roman de Mary Shelley.

Contributeurs  au scénarioRobert Florey, John Russell.

Musique : Bernhard Kaun (non-crédité au générique)

Interprètes : Boris Karloff (la créature), Colin Clive (le baron Henry Frankenstein), Mae Clark (Elizabeth), John Boles (Victor Moritz), Frederick Kerr (Baron Frankenstein), Edward Van Sloan (Dr Waldmann), Dwight Frye (Fritz), Lionel Belmore (le bourgmestre), Marilyn Harris (la petite Maria).

Sortie : 20 Novembre 1931 (Etats-Unis), 17 Mars 1932 (France)



PLUS SUR FRANKENSTEIN


BOUTIQUE SF-STORY


COMMENTAIRES

Note : veuillez remplir les champs marqués d'un *.

*Le hors-champ est la partie de la scène qui n'apparaît pas dans un plan d'un film parce qu'elle n'est pas interceptée par le champ de l'optique de la caméra que ce champ soit invariable (plan fixe), ou variable (plan où la caméra effectue un mouvement (panoramique et/ou travelling) et/ou un zoom).